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De passage à Paris, Alfred Eibel, Finitude
Dimanche, 21 Août 2011 16:57

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« Mais l’extraordinaire n’est pas intéressant à rapporter en tant que tel. Ce qui compte c’est la réflexion qui s’en dégage. Pas seulement la réflexion après l’événement; également le changement apporté à sa propre vie. » écrit-il à propos de l’écrivain Robin Cook, en 1994. « La plus grande responsabilité de l’écrivain n’est pas celle qui le lie à la littérature, mais celle qui le relie aux autres êtres humains. Si ce point de vue est correct, et je crois qu’il l’est, Walt Whitman de ce point de vue là est notre père à tous, alors naturellement l’histoire sera très importante dans notre travail, car c’est le moyen par lequel on peut le plus immédiatement capter l’attention des gens et narrer le plus directement l’histoire de leur vie. » C’est ce qu’il fait dire à Russell Banks la même année. « La vérité vraie, si l’on peut dire, se situe au niveau de la vision qu’on a de cette vérité, de l’inspiration propre à chaque individu, sans pour autant atteindre une formulation précise. Vous savez que vous aimez votre enfant, mais vous ne pouvez pas dire pourquoi vous aimez votre enfant. Pour la vérité c’est la même chose. Vous savez qu’elle existe, sans plus. Souvent les gens sont incapables de dire pourquoi ils entreprennent une démarche. Leurs vraies motivations demeurent confuses. » Dixit James Grady, l’auteur des Trois jours du Condor… Et l’on pourrait poursuivre par des citations d’Edward Bunker comme « L’Amérique de 1997 est à la fois la meilleure et la pire des époques. La haine est beaucoup plus forte de la part des Noirs à l’égard des Blancs que l’inverse », de Jim Nisbet comme « L’individu donne sa mesure dans des situations extrêmes » ou de Michael Connelly comme cette étonnante remarque : « En France, on me lit avant de m’interviewer. Ce n’est pas toujours le cas aux Etats-Unis. » Ce compliment s’adresse bien sûr à notre ami Alfred Eibel qui a rencontré ces écrivains anglo-saxons, de même que Lawrence Block, Robert Ludlum ou Toni Morrisson. Qui n’a-t-il pas rencontré, d’ailleurs, notre « passeur d’âmes », dont la modestie n’a d’égale que l’intelligence de ces entretiens réunis en un volume intitulé judicieusement De passage à Paris?

 

 

 

Allez, lisez donc ce qu’il obtient de Paul Auster, en 1993, sur la littérature américaine :


« On dit parfois que la littérature américaine est en déclin. Qu’en pensez-vous?

Paul Auster — Aujourd’hui nous vivons aux États-Unis une période très riche dans le domaine romanesque. La gamme d’esthétiques différentes est très large. Depuis vingt ans, on constate une floraison de littératures des plus remarquables. Des écrivains femmes avec une optique nouvelle, des écrivains noirs, des écrivains d’origine britannique, des écrivains d’origine chinoise, toutes ces histoires d’immigrants de la nouvelle génération sont en train de s’écrire. L’Amérique est un pays en perpétuelle mutation. Les gens arrivent au pays, s’imposent, ça prend une génération ou deux. Alors, il y a plein d’histoires à raconter. Songez à l’éclosion de la littérature juive: Below, Malamud, Roth, etc.

 — Quels écrivains du passé exercent encore une influence?

 — D’abord William Faulkner, Ernest Hemingway beaucoup moins. Il n’est pas oublié mais son influence a diminué en trente ans. De même que Dos Passos ou Thomas Wolfe. On l’a perdu. C’est fini. Il y a aussi incontestablement Nathanaël West. Il est l’auteur de Miss Lonelyhearts et d’un roman sur Hollywood The Day of the Locus. Malheureusement il est mort en 1940 à 37 ans. Le peu qu’il a laissé exerce encore une très forte influence. Par contre, des écrivains comme Erskine Caldwell ou James T. Farrell qui ont connu leur heure de gloire ne sont plus lus. Ce qui ne veut pas dire qu’on ne les redécouvrira pas dans une génération ou deux.

— Que représentent pour votre génération les grands écrivains du XIXe siècle?

— Herman Melville demeure le géant de la littérature américaine. Pas un seul écrivain qui n’ait un jour croisé son œuvre. Nathaniel Hawthorne est également très lu dans les écoles, de même que Thoreau, Whitman Emerson.

 — Et Henry James?

— J’éprouve quelques difficultés à le lire. Je n’ai jamais été un grand lecteur de James mais depuis une trentaine d’années environ, il est devenu, si j’ose dire, le n° 2, juste derrière Melville, de la littérature américaine, après avoir connu une éclipse de cinquante ans. C’est grâce à Lionel Trilling (1905-1975), un critique américain influent qui, dans les années cinquante, a recommencé à parler de James comme d’un écrivain de tout premier plan. La romancière Edith Wharton est également revenue sur le devant de la scène. Ont décliné, ne sont plus à la mode, Theodor Dreiser (1871-1945) l’auteur de An American Tragedy (1925) ou Frank Norris (1870-1902) l’auteur des Rapaces. Mais là encore l’avenir peut réserver des surprises. Un très bon ami à moi, Russell Banks, excellent romancier, est le seul que je connaisse qui se tient dans la ligne de Dreiser.

— Puisque vous évoquez Russel Banks qui se réfère aussi à Nelson Algren, quelle place occupe ce dernier dans les lettres américaines?

— On a récemment publié une biographie de Nelson Algren. On vient de rééditer ses romans longtemps épuisés. C’est un écrivain important.

— Vous parlez d’écrivains noirs, lesquels sont les plus représentatifs?

— Il y a Ishmaël Reed, un écrivain très intéressant, auteur de Mumbo Jumbo; Alice Walker, que je n’aime pa tellement, mais elle a du succès. Cette année, un livre de Terry McMillan a été vendu à 1000000 d’exemplaires.

— Parmi les minorités, y a-t-il des révélations?

— Il y a deux ans un écrivain cubain de la deuxième génération né à New York, un vrai Américain d’à peu près mon âge, Oscar Hijuelos, a obtenu le prix Pullitzer pour Manbo Kings plays songs of love qui a très bien marché. C’est la première fois qu’on a pu lire un livre sur le thème de cette génération d’origine cubaine aux États-Unis. Il y a Emy Tan, un écrivain d’origine chinoise qui, avec The Joy Luck Club, raconte l’histoire des Chinois d’Amérique. Depuis cinq ans, c’est probablement l’événement littéraire le plus marquant dans le pays. Tout cela montre que les Américains veulent lire des histoires d’immigrants.

— Qu’en est-il des écrivains de votre génération, de votre sphère?

— Dans la génération, dans ma sphère la plus proche, il y a une grande variété d’écrivains: Don DeLillo, Richard Ford, Tobias Wolff, Toby Olson qui n’est pas connu en France qui a écrit Sea-view. Il y a Nicholson Baker, l’auteur de The Mezzanine. Il pourrait être un écrivain français. Je crois qu’on véhicule souvent des clichés sur la littérature américaine. On se dit: un livre comme celui de Nicholson Baker, un tel esprit, une telle sensibilité, ce n’est pas possible, ça ne peut pas exister aux États-Unis. Ça existe pourtant!

— Mais certains écrivains ont-ils un vrai public ou sont-ils lus seulement par des universitaires?

— Il faut dire que la plupart des écrivains sont professeurs, pour des raisons financières. Quelques-uns se sentent un peu étouffés, un peu écrasés par cette expérience. C’est une vie trop isolée du vrai monde, trop préservée, qui fausse tout, surtout lorsque des étudiants vous admirent sans cesse. Ce qui peut arriver de mieux à un écrivain c’est qu’il prenne conscience qu’il n’est rien, , qu’il n’est personne, qu’il ne compte pas. Autrefois les écrivains pouvaient pratiquer différents métiers. Il est de plus en plus difficile de vivre en bohème.

— Le roman policier américain a-t-il subi des transformations notables?

— La qualité est inférieure à ce qu’elle était. La veine semble plus ou moins tarie. Cependant on continue à en publier des quantités. Le dernier grand du roman policier américain, un authentique écrivain, dans la ligne de Hammett et Chandler, avec un apport très personnel, était John Ross MacDonald. Après lui, il n’y a pas eu vraiment une quatrième génération. Ce qui est à la mode, ce sont les livres qui traitent d’authentiques affaires criminelles.

Depuis quelque temps, on parle beaucoup de Walter Mosley dont on a traduit en français dans la Série Noire Le Diable en robe bleue (N° 2268). C’est un écrivain noir qui prend comme personnage principal un Noir de Los Angeles évoluant dans les années 40-50. C’est l’écrivain préféré de Bill Clinton.

— Que pensez-vous des gens comme James Ellroy, Barry Gifford?

— Ellroy est connu aux États-Unis mais pour moi ce n’est pas un écrivain important. Il y a un écrivain mort récemment dont j’appréciais le talent, c’est Charles Willeford. Quant à Barry Gifford, il est difficile de l’enfermer dans un genre. Il est considéré comme un écrivain tout court. Je me souviens aussi d’un très bon livre policier de John Gregory Denne: True Confession (Sanglantes confessions) dont Ulu Grosbard a tiré en 1981 un très bon film avec Robert Duval et Robert de Niro.

— Que pensez-vous de la critique américaine?

— Si l’on s’en tient à la critique journalistique, il me serait difficile de citer un nom. En Amérique, il n’y a pas cette complicité entre éditeurs et journalistes comme en France. Le journal ne divulgue pas le nom de celui qui va écrire l’article. L’éditeur l’ignore jusqu’à ce que l’article soit publié. C’est ça la surprise, le goût du secret. Un jour on me téléphone du “New York Time Book Review” pour écrire un article sur Edmond Jabès. J’ai dit: “Très bien, parfait; de plus, Jabès est un ami”. “C’est impossible. Si c’est un ami, me répond le journal, vous ne pouvez pas écrire cet article”. Ça vaut mieux ainsi.

— Quelles sont à votre avis les qualités essentielles pour être un bon romancier?

— Un romancier doit avant tout savoir raconter une histoire, une notion plus ou moins perdue par beaucoup d’écrivains. Ezra Pound a dit un jour: “Si la poésie perd le contact avec la musique et la danse, ce n’est plus de la bonne poésie”. Et pour le roman si l’écrivain perd le contact avec le désir, le plaisir de raconter — dans le sens d’une tradition orale de raconter — ce n’est plus très intéressant.

 

De passage à Paris, Alfred Eibel, Finititude, 120 pages, 13,50 €.